« Je n’aurais jamais acheté cette maison si j’avais su ! »
Si vous prononcez un jour cette phrase c’est que vous êtes dans une situation plutôt embarrassante.
En réalité il existe peut-être un moyen de faire annuler la vente.
En droit, ce type de situation s’apparente à un Vice du Consentement et plus précisément à l’erreur.
Pour rappel et pour faire simple, pour qu’il y ait contrat de vente, il faut que les vendeurs et les acquéreurs soient d’accord sur la désignation de l’immeuble ou du terrain et soient également d’accord sur le prix.
L’erreur vicie le consentement lorsque son existence a pour conséquence que l’une des parties n’aurait pas signé l’acte de vente ou aurait contracté à des conditions très différentes (C.civ art 1130).
QU’EST-CE QUE L’ERREUR ?
L’erreur est une représentation erronée de la réalité.
Il existe :
- l’erreur obstacle
- l’erreur substantielle
- et la question de l’erreur sur le prix sera abordée.
A – L’erreur obstacle
C’est l’erreur qui empêche la formation du contrat puisque le consentement entre acheteur et vendeur n’existe pas.
C’est le cas par exemple lorsque on croit acheter une parcelle de terrain alors que c’est celle d’a coté qui a été finalement achetée. Ce type de situation est assez rare.
L’erreur est tellement grossière qu’elle fait obstacle au rapprochement des consentements nécessaire à l’acte de vente.
B – L’erreur substantielle
Les situations les plus courantes concernent l’erreur portant sur les qualités substantielles du bien acheté.
Par exemple : la surface de l’immeuble. Vous pensez acheter une maison de 100m² habitable alors qu’il n’y en a réellement que 90 m².
Cette erreur doit toutefois être d’une ampleur telle que sans elle vous n’auriez pas acheté le bien ou vous auriez posé certaines conditions.
Quelques exemples :
L’erreur a été jugé suffisamment importante car difficile à constater et relevant d’une obligation sanitaire. (CA Lyon du 19.10.2006 n°05/246).
Pour les juges, même s’il en avait été avisé, l’acheteur ne pouvait pas, antérieurement à la mise en service des éoliennes, anticiper l’existence de leur bruit continu « comparable à une lessiveuse ou un gros ventilateur, audible à l’intérieur de la maison », et son erreur était « excusable compte tenu de l’évolution récente du parc éolien et du manque d’information dont disposaient les particuliers sur l’impact sonore d’une telle installation » (Cass. 3e civ., 29 juin 2017, n° 16-19.337).
Il est important à ce stade de préciser que si l’acheteur régulièrement prévenu avait accepté le risque (par écrit ou tacitement), l’erreur n’aurait jamais pu être évoquée.
Il est donc important au moment des visites plutôt que de cacher un élément important, au contraire, de présenter toutes les informations afin que l’acquéreur achète en toute connaissance de cause et ne puisse une fois la vente actée revenir sur sa décision.
La Cour de cassation juge alors que cette erreur porte sur une qualité essentielle du bien acquis, à savoir sa surface habitable, de sorte que la vente doit être annulée (Cass. 3e civ., 13 juill. 2022, n° 20-21.293, n° 586 F-D).
Il est important à ce stade de préciser que si l’acheteur régulièrement prévenu avait accepté le risque (par écrit ou tacitement), l’erreur n’aurait jamais pu être évoquée.
Les citoyens gagnent le procès ;
Le terrain redevient inconstructible mais il est déjà acheté par l’acquéreur qui invoque l’erreur.
La Cour de cassation estime que le risque d’inconstructibilité totale du terrain préexistait à la vente et était imprévisible pour les parties. En conséquence, il y a erreur sur la constructibilité du bien acquis, laquelle étant un élément du consentement de l’acquéreur, constitue une condition substantielle de la vente et entraîne la nullité de celle-ci (Cass. 3e civ., 15 juin 2022, n° 21-11.708, n° 481 FS-D).
Ne constitue pas une erreur pouvant faire annuler la vente :
L’erreur sur un simple motif étranger aux qualités essentielles ; à moins que l’acquéreur n’en ait fait expressément une condition déterminante de son consentement
Par exemple vous achetez une maison qui comporte une quinzaine de fenêtres sur le plan annexé à l’acte de vente. En réalité il n’y en a que 14…
Il sera difficile de prouver au juge que l’existence d’une quinzième fenêtre était une condition substantielle sans laquelle vous n’auriez jamais acheté la maison…
Sauf si vous aviez précisé cette condition dans vos échanges
QUE FAIRE SI VOUS ETES DANS UNE TELLE SITUATION ?
Si vous avez été induit en erreur, vous avez 5 ans à compter du jour où l’erreur a été découverte pour demander l’annulation de la vente.
Vous devrez prouver :
- Que vous vous êtes trompé sur une qualité essentielle
- Que vous n’auriez jamais acheté si vous aviez su, ou vous auriez négocié davantage
Si vous êtes acquéreur, il peut être intéressant lorsque vous rédigez votre offre d’achat d’indiquer clairement certains points qui ont une importance capitale dans votre process d’achat.
PEUT IL Y AVOIR UNE ERREUR SUR LE PRIX ?
En d’autres termes :
- j’ai cru que cette maison valait 350 000 €,
- je me rends compte qu’elle n’en vaut réellement que 300 000 €
- un prix honnête était une condition substantielle à mon consentement
- je demande donc l’annulation de la vente
La réponse est négative.
L’erreur sur la valeur, par laquelle, sans se tromper sur les qualités essentielles de la prestation, un contractant fait seulement de celle-ci une appréciation économique inexacte, n’est pas une cause de nullité (C. civ., art. 1136)
Il existe toutefois un mécanisme spécifique appelée la lésion.
Le vendeur peut, conformément aux dispositions de l’article 1674 du code civil, demander la rescision de la vente lorsqu’il a été lésé de plus de sept douzièmes dans le prix d’un immeuble.
Vous l’aurez compris cette protection ne concerne que le vendeur qui aurait fait une très mauvaise affaire en vendant très en dessous du prix.
Il faut ici vérifier que le prix fixé dans l’acte de vente n’atteint pas les 5/12e de la valeur réel du bien.
Par exemple :
Un bien a été vendu à 150 000 € alors qu’il en vaut 190 000 € ne pourra pas être remis en cause car 190 000 x 5/12 = 79 166 €
et 150 000 € est plus élevé que 79 166 €
En revanche si un vendeur a cédé sont bien à 150 000 € alors qu’il en vaut 370 000 €, il pourra obtenir gain de cause car 370 000 x 5/12 = 154 166 €
Il a donc vendu son bien en dessous des 5/12 de sa valeur.
Effet de la lésion : Si la rescision pour lésion est admise :
L’acquéreur aura le choix entre :
- soit de rendre la chose en retirant le prix qu’il en a payé ;
- soit de la garder en payant le supplément du juste prix, sous la déduction du dixième du prix total.
C. civ., art. 1681
EN RESUME
Il est important d’apporter à la connaissance de l’acquéreur TOUTES les informations qui peuvent lui être utile au moment de faire son offre d’achat.
Lui cacher des informations conduira soit à ce que l’acte de vente ne soit pas signé (perte de temps), soit à un risque de contentieux (perte de temps et d’argent).
Il est également important de faire valoriser correctement le bien par un professionnel.
Au cabinet Pragma, nos avocats ont la qualité d’avocats mandataires en transaction immobilière.
Nous pouvons donc vendre les biens de nos clients et nous faisons particulièrement attention à ce qu’une information transparente soit donnée aux futurs acquéreurs.
Si une difficulté est détectée, nous agissons en conséquence pour débloquer la situation ou s’assurer que l’acheteur acquiert la propriété en toute connaissance de cause.
Me Richard PATOU PARVEDY est également expert en valorisation immobilière auprès du Centre Nationale de l’Expertise.
Nous restons à votre disposition pour vous accompagner dans la vente de vos biens immobiliers.
Maître Richard PATOU PARVEDY