« Plus on s’élève et plus dure est la chute »
Proverbe chinois
Ce niveau de défaillance d’entreprises sans précédent n’est pas sans conséquence pour le chef d’entreprise car à chaque dépôt de bilan, il y a notamment :
- Des créances qui demeurent impayées ;
- Des salariés qui sont licenciés ;
- Des engagements de caution qui sont activés.
Qui dit aussi faillite d’entreprise, dit également responsabilité du chef d’entreprise.
Le droit français dispose d’un arsenal juridique pour sanctionner les chefs d’entreprises qui auraient conduit leur entreprise à la faillite.
Cette étude pourra vous éclaircir sur les principaux risques que vous encourrez en cas de faillite de votre entreprise.
[1] Le nombre de faillites d’entreprises au plus haut depuis 6 ans (Journal Libération) – 5 janvier 2024
I. Sur la responsabilité pour insuffiance d’actif
Prévue aux articles L. 651-1 et suivants du Code de commerce, la responsabilité pour insuffisance d’actif vise à faire peser sur les chefs d’entreprise (les dirigeants de société et les entrepreneurs individuels le cas échéant), tout ou partie des dettes de l’entreprise.
La responsabilité du chef d’entreprise pourra être recherchée si 4 conditions sont réunies :
- Une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte contre l’entreprise ;
- L’actif de l’entreprise ne permet pas d’apurer le passif de l’entreprise ;
- Le dirigeant[2] a commis une ou plusieurs fautes de gestion avant le jugement de liquidation judiciaire (notamment l’absence de comptabilité ou une comptabilité incomplète)[3];
- Les fautes de gestion ont causé la faillite de l’entreprise.
Pour illustrer schématiquement cette action, prenons l’exemple de M. PAYET, dirigeant de SARL, qui a commis des fautes de gestion (absence de comptabilité par exemple).
Le passif s’élève à 300 000 €.
Une liquidation judiciaire est ouverte contre la société de M. PAYET, et l’actif n’a permis que de purger 100 000 € de dettes sur les 300 000 €.
Il reste donc 200 000 € à régler pour désintéresser les créanciers.
Dans cette situation, si les fautes de gestion sont caractérisées et en lien avec la faillite de l’entreprise, alors M. PAYET risque de devoir payer la somme de 200 000 € sur son patrimoine personnel.
Dans le cas de M. PAYET, on pourrait penser que la solution serait de ne pas déclarer l’état de cessation des paiements pour éviter les problèmes.
Grave erreur, ne pas déclarer l’état de cessation des paiements peut non seulement constituer une faute de gestion, mais peut également amener à une interdiction de gérer.
Au contraire, le maître mot est l’anticipation. Plus tôt l’état de cessation des paiements est déclaré au Tribunal, plus le chef d’entreprise sera préservé d’une action sur son patrimoine personnel.
Votre avocat peut vous accompagner pour anticiper toutes ces questions, analyser les risques, et faire le nécessaire afin de préserver votre patrimoine personnel.
[2] Les associés ne sont pas concernés par cette action.
[3] La simple négligence du dirigeant ne constitue pas une faute de gestion.
II. Sur les sanctions professionnelles
- La faillite personnelle ;
- L’interdiction de gérer.
A. La faillite personnelle
Prévue aux articles L. 653-3 et suivants du Code de commerce, la faillite personnelle est une sanction professionnelle visant à interdire au chef d’entreprise d’exercer toute activité à titre indépendant (que ce soit en nom personnel, ou en tant que dirigeant ou associé d’une personne morale) pour une durée maximale de 15 ans. La faillite personnelle peut être prononcée pour différents motifs lorsque les faits ont été commis avant l’ouverture de la procédure collective, notamment :
- Le chef d’entreprise a poursuivi abusivement une exploitation déficitaire ;
- Le chef d’entreprise a détourné et/ou dissimulé de l’actif ;
- Le chef d’entreprise n’a pas tenu de comptabilité ou celle-ci est incomplète.
En cas de faillite personnelle, le dirigeant peut également se voir retirer le droit d’exercer un mandat politique pendant une durée de 5 ans, ou encore être contraint de céder ses droits sociaux dans la société faisant l’objet de la procédure collective. En cas de non-respect de la mesure d’interdiction, le chef d’entreprise encourt une peine d’emprisonnement de deux ans et une amende de 375 000 € (article L. 654-15 du Code de commerce.
B. L’interdiction de gérer
Reprenons le cas de M. PAYET, si celui-ci est condamné à la faillite personnelle alors il ne pourra plus exercer aucune activité indépendante, et devra se diriger vers une activité salariée.
En revanche, si une mesure d’interdiction de gérer est prise ; la sanction ne portera que sur une partie de ses activités (les activités artisanales par exemple).
Il faut savoir que plusieurs obligations sont sanctionnées par une interdiction de gérer, notamment dans les cas suivants :
- Le dirigeant n’a pas déclaré l’état de cessation des paiements dans le délai légal ;
- Le dirigeant n’a pas coopéré avec les organes de la procédure collective[4] (notamment en refusant ou en omettant de remettre la liste des créanciers).
Encore une fois, l’anticipation est la clé.
Une mesure d’interdiction de gérer peut être évitée si vous déclarez au plus tôt l’état de cessation des paiements et que vous coopérez avec les organes de la procédure collective.
Votre avocat est là pour vous accompagner dans cette démarche, et travailler avec les organes de la procédure collective afin de vous éviter une telle mesure coercitive.
[4] A savoir les Mandataires et Administrateurs judiciaires.
III. Sur l’infraction pénale de banqueroute
Outre les sanctions pécuniaires et professionnelles, le chef d’entreprise peut également faire l’objet de poursuites pénales dans le cadre d’une procédure collective.
La banqueroute constitue la principale infraction pénale, mais il y a également d’autres infractions pénales qui peuvent s’appliquer suivant les situations[5].
La banqueroute est une infraction pénale prévue par les articles L. 654-1 et suivants du Code de commerce, punie de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.
Le chef d’entreprise encourt également les peines suivantes pour une durée de 5 ans :
- L’interdiction des droits civiques (notamment le droit de vote) ;
- Une interdiction de gérer et/ou l’interdiction d’exercer un mandat politique ;
- L’exclusion des marchés publics ;
- L’interdiction d’émettre des chèques.
La banqueroute s’apparente à la faillite personnelle dans ses motifs, elle pourra être relevée notamment dans les cas suivants :
- Le chef d’entreprise a poursuivi abusivement une exploitation déficitaire ;
- Le chef d’entreprise a détourné et/ou dissimulé de l’actif ;
- Le chef d’entreprise n’a pas tenu de comptabilité ou celle-ci est incomplète.
Toutefois, elle a des différences tout de même notables avec la faillite personnelle puisque le dirigeant n’est pas le seul visé par cette procédure.
L’associé peut être condamné à la banqueroute en tant que complice ou en tant que receleur.Cette infraction pourrait toucher un fournisseur ou un partenaire commercial suivant la situation.
Le champ d’action est donc plus large que la faillite personnelle.
Si vous êtes dans une situation dans laquelle vous redoutez qu’il y ait matière à banqueroute, alors nous vous recommandons fortement de vous faire conseiller par votre avocat afin d’éviter ou de réduire le risque de l’infraction.
[5] Ces infractions ne sont pas traitées dans le cadre de cette étude.
Le Cabinet PRAGMA défend depuis de nombreuses années les chefs d’entreprises avant et pendant la phase de la procédure collective.
Par expérience, nous pouvons affirmer que connaitre les bonnes pratiques durant les premières difficultés de l’entreprise maximise les chances de redresser celle-ci et de préserver le patrimoine propre du chef d’entreprise.
N’hésitez pas à vous faire accompagner.